La Nuit des idées 2024 : rencontres autour des "Lignes de faille"
L’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne en partenariat avec l’Institut français a accueilli pour la troisième année consécutive la Nuit des idées. La soirée s’est tenue le 17 octobre et a été enrichie des collaborations avec la bibliothèque interuniversitaire de la Sorbonne (BIS), la bibliothèque Sainte-Geneviève, les Éditions de la Sorbonne et Sorbonne Art Gallery.
Pour cette édition, trois rendez-vous ont eu lieu sur le thème « Lignes de faille » : deux rencontres à l’Institut de Géographie de la Sorbonne et à la bibliothèque Sainte-Geneviève et une exposition au Centre Panthéon. Le thème « Lignes de faille » désigne aussi bien les grandes ruptures technologiques et scientifiques, les dynamiques de polarisation nouvelles et l’onde de choc des nouvelles formes de mobilisations. Mais en son sens même, la faille représente une rupture entre deux blocs rocheux, ou bien au sens figuré une faiblesse un défaut, une contrainte. C’est dans cette optique que les trois événements ont réuni chercheurs et chercheuses, diplomates et artistes pour échanger autour d’un sujet commun.
Une faille dans les politiques publiques françaises en matière de mobilités et changements climatiques ?
La BIS a lancé en 2023 un cycle de conférences ÉcoloBIS, dans l’objectif de diffuser l’actualité de la recherche en sciences humaines et sociales autour des questions environnementales, écologiques et climatiques, et de contribuer au débat sur leurs enjeux au sein du monde universitaire. Une réflexion est également portée sur le fonctionnement interne de la bibliothèque en termes de réduction d’empreinte carbone et de mise en place de pratiques de sobriété numérique. Dans le cadre d’ÉcoloBIS, une rencontre sur les questions de mobilités et changements climatiques notamment dans les politiques publiques en France a été organisée à la bibliothèque de Géographie de l’Institut de Géographie de la Sorbonne, en collaboration avec les Éditions de la Sorbonne. Jean-Baptiste Frétigny, maître de conférences en géographie à CY Cergy Paris Université, et chercheur associé à l'UMR Géographie-cités et Caroline Bouloc, docteure en géographie sociale, ont présenté leur ouvrage Mobilités et changement climatique : quelles politiques en France ? coécrit avec Laure Cazeaux et Pierre Bocquillon. Dans un contexte d’urgence climatique, le but était de réfléchir aux possibilités de réduction d’empreinte carbone (décarbonation) en se focalisant sur les mobilités et donc, le secteur des transports. En France, le secteur des transports est celui qui contribue le plus aux émissions de gaz à effet de serre (GES) : il représente 31% de l’ensemble des émissions françaises de GES. En analysant la situation par le prisme de différents acteurs (médias, acteurs publics, privés, société civile) et à différentes échelles (régionale, nationale, européenne), les quatre chercheurs et chercheuses ont constaté que cet objectif de décarbonation du secteur des transports était partiellement présent dans les politiques publiques françaises. En revanche, d’autres acteurs se mobilisent davantage comme les ONG et la société civile qui œuvrent pour une transition écologique plus efficace.
Sur la faille, l’Islande à la croisée des défis contemporains
La deuxième rencontre s’est déroulée dans la bibliothèque nordique, un des trois fonds de la bibliothèque Sainte-Geneviève. La bibliothèque nordique possède le fonds sur les langues et les civilisations d’Europe du Nord le plus important au monde, lieu idéal pour accueillir une conférence sur l’Islande, à la croisée des défis contemporains. Son Excellence Madame Unnur Orradóttir-Ramette, ambassadrice d’Islande en France et représentante permanente de l’Islande auprès de l’OCDE a rappelé que l’Islande était un des pays les plus emblématiques pour parler de faille. En effet, l’Islande possède un contexte géologique particulier. Le volcanisme actif de l’île a entraîné la création d’une faille volcanique qui traverse le pays. Ce contexte géologique est particulièrement lié aux questions de transition énergétique et écologique. Cependant, les défis actuels de l’Islande sont aussi géopolitiques. La nécessité de coopération entre états et entre individus a été mise en avant par Madame l’ambassadrice. L’Islande étant un pays de petite taille, il peut être considéré comme un prisme du contexte géopolitique actuel. Michel Sallé, docteur en études politiques et spécialiste de l’Islande contemporaine a insisté sur la nécessité pour l’Islande de rester ouverte au monde. La faille de l’Islande est d’abord volcanique mais elle existe aussi par la quasi-absence de ressources naturelles, la faible densité de population et l’aspect insulaire du pays. Pour exister et garder cette ouverture sur le monde, les Islandais et Islandaises ont profité de cette culture unique. Katrin Timonen, étudiante finno-islandaise en master à Sciences Po a pu partager son témoignage sur la culture islandaise.
La faille, un outil pour la création artistique
Sorbonne Artgallery en partenariat avec les collectifs des ou-x-po a imaginé l’exposition collective « Compléments sous contraintes » qui rassemble des œuvres de différentes branches actuelles du mouvement littéraire historique Oulipo (Ouvroir de littérature potentielle) en mettant en valeur plusieurs formes d’art : la photographie, la peinture, la bande dessinée, etc. La faille est interprétée ici comme contrainte : l’idée était de montrer comment il est possible de pousser les limites de la création artistique en la conjuguant aux contraintes. Elles apparaissent alors comme un enrichissement pour de nouvelles formes de créativité. L’exposition s’est tenue dans divers lieux du centre Panthéon de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne : la Galerie Soufflot et la cour intérieure du centre Panthéon. Elle a également donné lieu à une journée d’études « La galaxie des ouvroirs en Sorbonne » réalisée le 5 octobre dernier par l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et l’université Paris Cité, un moyen de montrer que les activités de recherche sont indissociables de la création.